Fête de saint Denys et ses compagnons

Source: FSSPX Actualités

Venu d’Athènes en nos régions, saint Denys féconda de son sang généreux la semence répandue par lui dans la future capitale du pays des Francs.

Riche de son très saint corps, l’humble bourgade devenue Saint-Denys en France l’emporta longtemps sur Lutèce, sa voisine, en renommée. Notre patrie rendait en gloire à son apôtre le dévouement qu’il lui avait montré ; il sembla que, dans une inspiration chevaleresque, elle eût pris à tâche de compenser l’adieu qu’il avait dit pour elle aux grands souvenirs du sol natal.

On sait l’immense concours du peuple au saint tombeau, et surtout la piété des rois. L’oriflamme, bannière du Martyr, fut leur étendard ; Mont-Joye Saint-Denys, leur cri de guerre sous tous les cieux où les conduisait la victoire. Comme, durant cette vie, ils ne quittaient point le royaume sans remettre sa garde au protecteur des lys de France en son abbaye, c’était encore à lui qu’au sortir de ce monde, on les voyait confier leurs restes mortels.

Malgré de sacrilèges profanations, la nécropole auguste réserve à la terre, pour le dernier jour, un spectacle sublime, lorsque sous les yeux d’Adrien césar et de ses préfets, le supplicié de Montmartre, le condamné qu’ils vouèrent à l’infamie, se lèvera de sa tombe escorté des trois dynasties fières de former sa cour en la résurrection, comme elles s’honorèrent de l’entourer dans la mort.

Le récit de l’Eglise romaine touchant saint Denys et ses Compagnons est conforme à celui de l’Eglise grecque en ses Menées, bien que le 3 octobre soit pour celle-ci le jour de leur fête.

« Denys était d’Athènes, et l’un des juges de l’Aréopage. Son instruction était complète en tout genre de science. Encore païen, on raconte que témoin de la miraculeuse éclipse de soleil arrivée le jour où fut crucifié le Seigneur, il s’écria : Ou le Dieu de la nature souffre, ou le système du monde se détruit. Paul étant donc venu à Athènes, et ayant rendu compte de la doctrine qu’il prêchait dans l’Aréopage où on l’avait conduit, Denys et beaucoup d’autres crurent au Christ dont l’Apôtre annonçait la résurrection comme prémices de celle de tous les morts.

Saint Paul le baptisa et lui remit le gouvernement de l’église d’Athènes. Venu plus tard à Rome, il reçut du Pontife Clément la mission d’aller prêcher l’Evangile en Gaule et pénétra jusqu’à Lutèce, ville des Parisiens, en la compagnie du prêtre Rustique et du diacre Eleuthère. Il y convertit beaucoup de monde à la religion chrétienne, en suite de quoi le préfet Fescennius le fit battre de verges avec ses compagnons. Sa constance a prêcher la foi n’en étant nullement ébranlée, ils passèrent ensemble par le supplice du gril ardent et beaucoup d’autres.

Mais comme ils affrontaient avec courage et joie tous ces tourments, Denys, âgé de cent un ans, fut avec les autres frappé de la hache le sept des ides d’octobre. On rapporte de lui que prenant dans ses mains sa tête tranchée, il la porta l’espace de deux milles. »

Honneur à vous en ce jour de victoire ! honneur au Docteur des nations qui vous reçoit comme sa très noble conquête au seuil de l’éternité ! Quel ne fut pas, dès la première heure, l’élan de votre âme vers ce Dieu inconnu (Ac 17, 23) que l’Apôtre découvrait enfin aux longues aspirations de votre riche et droite nature ! Aux ténèbres du polythéisme, aux doutes de la philosophie, aux trop vagues lueurs de confuses traditions succédait subitement la lumière, et son triomphe était complet.

La distinction du grec et du barbare, loi du vieux monde, s’effaçait pour lui dans l’origine commune assignée par Paul à tous les peuples (Ac 17, 26) ; tandis qu’esclaves et libres s’embrassaient, aux regards de sa foi, dans cette noblesse qui fait du genre humain la race de Dieu (Ac 17, 29), la charité, qui débordait en son cœur, n’y laissait plus que l’immense pitié de Dieu lui-même pour les longs siècles de l’ignorance où l’humanité s’était vue plongée (Ac 17, 30).

Ainsi dans votre zèle, vous prêtant au souffle de l’Esprit comme la nuée chargée des bénédictions du Seigneur, apportiez-vous la fertilité jusqu’aux terres de l’extrême Occident ; ainsi, père de notre patrie, nos pères apprenaient ils de vous à chercher Dieu, à le trouver, à vivre en lui ; ainsi notre lointaine Eglise n’avait-elle point à jalouser les premières, bâties sur le fondement des Prophètes et des Apôtres.

O pierre de choix, bonne aux fondations, si intimement unie à la pierre d’angle que toute construction qu’elle porte s’élève en un temple saint du Seigneur : nous aussi, bâtis sur vous, nous sommes par vous la maison de Dieu.

O Denys, réveillez en nous les germes divins. Rendez Paris et la France à leurs traditions, oubliées dans la fièvre du lucre et des plaisirs. Ramenez Athènes à la communion du vicaire du Christ, indispensable condition de l’union au Seigneur.

Dom Guéranger, Année liturgique

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