France : qui a peur de la messe traditionnelle ?

Source: FSSPX Actualités

La Conférence des évêques de France (CEF) a rédigé une note intitulée : « Synthèse des résultats de la consultation sur l’application du Motu proprio Summorum pontificum demandée par la Congrégation pour la doctrine de la foi en avril 2020 ». Cette synthèse est un document de 10 pages, globalement hostile à la messe tridentine.

Le site Paix liturgique du 18 janvier qui la publie intégralement, relève que « la réalisation de cette synthèse est une sorte de coup de force. La Congrégation romaine aurait dû elle-même analyser les réponses des évêques et en faire une synthèse générale.

Mais, tant la Conférence italienne que la Conférence française (d’autres aussi, sans doute), ont décidé de faire elles-mêmes ce travail, ce qui permet, selon l’inclination habituelle des conférences épiscopales, d’élaborer une ligne générale, dans laquelle un certain nombre d’évêques ne se reconnaîtront pas, et de formuler des vœux censés être ceux de tous. »

En dépit de cette orientation défavorable, le rédacteur anonyme de la note de synthèse ne peut cacher l’intérêt confirmé de séminaristes pour cette liturgie, qu’ils doivent satisfaire généralement par eux-mêmes, ni les infléchissements (considérés comme marginaux) de la forme ordinaire à cause de la présence de la forme extraordinaire, ni l’engouement des jeunes pour la liturgie traditionnelle.

Dans l’ensemble, à la lecture de cette note, la Conférence des évêques de France se montre méprisante pour les participants à la liturgie traditionnelle : « formation indigente » des prêtres des communautés Ecclesia Dei [en clair, pas assez conciliaire], « faible dynamisme missionnaire » [malgré la moyenne d’âge et le taux de croissance des participants], prédications « médiocres » …

La Fraternité Saint-Pie X, quant à elle, est superbement ignorée au prétexte qu’elle serait « hors de l’Eglise ».

Sur le site Le Rouge & le Noir du 29 janvier, l’abbé Claude Barthe complète cette analyse : « Si l’on en croit le rédacteur [de la note], les évêques affirmeraient que la forme extraordinaire n’est pas missionnaire, ce qui laisse pantois quand on sait que les messes paroissiales [Paul VI] sont toujours plus désertées, tandis que les célébrations traditionnelles font le plein et provoquent, notamment chez les jeunes, un nombre non négligeable de conversions (la synthèse reconnaît d’ailleurs cet attrait qu’elle exerce sur les jeunes, mais l’explique par leur “fragilité”, leur désir d’une identité rassurante…). – Les chiffres donnés au sujet des messes traditionnelles sont typiquement les “chiffres de la police” (elles rassembleraient en moyenne entre 20 et 70 personnes…). »

Sur le site de Renaissance catholique Jean-Pierre Maugendre insiste sur cette prétendue « faible dimension missionnaire » de la messe traditionnelle : « entendre un évêque de France, par sa fonction plus ou moins solidaire d’une pastorale qui, en l’espace de deux générations, a vu la pratique dominicale passer de 25% à moins de 1,8% de la population faire des leçons d’esprit missionnaire est, pour le moins, déconcertant. »

Et d’ajouter pertinemment : « D’un point de vue doctrinal, certaines affirmations surprennent. Il est plusieurs fois fait mention, avec ou sans guillemets, d’“Eglise conciliaire” ou d’“enseignement conciliaire”. L’expression, employée en juin 1976 dans un courrier de Mgr Giovanni Benelli, substitut de la Secrétairerie d’Etat, à Mgr Lefebvre, avait suscité l’indignation du fondateur de la Fraternité Saint-Pie X qui, quant à lui, ne souhaitait appartenir qu’à l’Eglise catholique. »

In fine ou in cauda, la note épiscopale donne à Rome deux conseils : 1. être vigilant à ne pas étendre la forme extraordinaire ; 2. contraindre les prêtres et les fidèles de la forme extraordinaire au bi-formalisme, tantôt extra, tantôt ordinaire. En ajoutant que « très massivement les évêques reviennent [dans leurs réponses] sur l’exclusivité de la célébration [traditionnelle], l’usage du lectionnaire, d’un même calendrier liturgique (sanctoral) et l’adhésion au magistère actuel. »

Comme le souligne Paix liturgique du 1er février : « A terme, pourrait bien intervenir une pression sur les instituts Ecclesia Dei en faveur du bi-formalisme, s’ils étaient mis, comme cela devrait arriver, sous la juridiction de la Congrégation pour les religieux et non plus sous celle de la Congrégation pour la doctrine de la foi. »

L’abbé Barthe – sur Le Rouge & le Noir déjà cité – se demande : « la Conférence des évêques de France […] aimerait bien que Rome réduise la voilure de la liturgie traditionnelle. Mais l’Eglise de France exsangue, qui a de moins en moins de fidèles, de prêtres et de deniers, a-t-elle la capacité de repartir en guerre, comme dans les années qui suivirent le Concile ? »

Comme le signale le site FSSPX.Actualités du 22 janvier : « il est un point sur lequel on ne peut être que d’accord, c’est d’ailleurs la dernière phrase du document : “L’application de ce Motu proprio pose ultimement des questions ecclésiologiques plus que liturgiques.” C’est là toute la question : à ecclésiologie nouvelle, nouveaux rites, nouvelle théologie, nouveau catéchisme, nouveau droit canon, et finalement nouvelle Eglise “conciliaire” qui n’en finit pas d’agoniser sous nos yeux. »